truth will hit you like a train ~ deimaë

Deimos & Danaë

There are some things in this world you rely on, like a sure bet. And when they let you down, shifting from where you've carefully placed them, it shakes your faith, right where you stand.

Elle l'avait fait. Elle avait encore le coeur éclaté en mille morceaux, et ce n'était pas près de s'arranger, mais elle l'avait fait. Elle avait dit les mots, elle avait eu le courage, la force d'aller jusqu'au bout. Elle n'avait pas flanché, elle n'avait pas fait marche arrière. D'une certaine façon, elle aurait pu être fière d'elle. Elle avait atteint son objectif, ce pour quoi elle avait travaillé pendant une longue et pénible année. Mais il n'y avait pas de quoi se réjouir. Il n'y avait pas de quoi parader dans les couloirs de Tour Nuage en se vantant d'avoir obtenu son Dischantix. Elle l'avait accueillit avec beaucoup de misère. Le contrôle mental. La capacité de faire faire n'importe quoi à n'importe qui. Le pouvoir d'implanter une pensée capable de détruire de l'intérieur une victime. Une chose sournoise, catastrophique et dangereuse. Quelque chose qu'elle avait obtenu au dépend de son propre sang. Pouvait-elle seulement en être fière ? Est ce que les yeux suppliants de Demeter viendraient la hanter à chaque fois qu'elle en ferait usage ? Elle n'en serait pas surprise. Car le prix à payer devait surement être aussi élevé que le sacrifice qu'elle avait eu à subir. Rien n'avait jamais été simple dans sa vie, et elle ne s'attendait pas à ce que cela change de sitôt.

Elle aimerait penser que le plus dur est derrière elle, mais elle sait que ce n'est encore qu'une illusion. Ses nuits sont de plus en plus agitées. Elle ne dort presque plus et en tout cas jamais sans être réveillée par d'horribles cauchemars qui lui rappellent sans cesse l'horreur de ses actions. L'année touche à sa fin, elle est censée rentrer bientôt chez les Crescens, mais elle ne s'en sent pas la force. Elle n'a pas envie de faire semblant, de prétendre encore un été de plus d'être la fille d'un couple d'étranger. Elle ne veut pas retourner à Berstia, risquer de croiser la route de sa soeur. Que se passera t il alors ? Qu'est ce qu'elle pourrait bien avoir à lui dire ? Elle pense que Demeter est retournée à Capac, évidemment, où aurait-elle pu bien aller d'autre ? Après leur terrible discussion, elle ne l'a en tout cas plus revue dans les couloirs de Tour Nuage. Son nom n'est plus jamais arrivé à ses oreilles. Elle s'est évaporée et Danaë n'aurait jamais pensé qu'elle était capable de vivre aussi longtemps sans croiser son regard.

Elle envisageait de ne pas passer tout l'été à Berstia. Elle serait surement obligée d'y retourner un peu, peut-être à la fin de l'été, pour maintenir les apparences. Mais elle n'est pas assez forte pour subir la pression de sa terre natale. Alors elle pense demander à Morphéa de pouvoir rester au sein des Endormis. Habiter au Bella Note et travailler pour leur cause une partie des vacances. Il y avait toujours à faire et Morphéa était toujours prête à l'aider. Ca serait surement possible et cette pensée ôtait un peu du poids qui pesait sur ses épaules. Mais elle n'allait toujours pas mieux, tout n'était toujours pas réglé. Car depuis ce jour terrible, elle n'avait toujours rien dit à Deimos. Son frère n'était peut-être même pas encore au courant et à nouveau c'était elle et ses frêles épaules qui seraient obligées d'énoncer les paroles cruelles. Elle ne pouvait pas lui cacher, il devait l'apprendre. Mais que penserait-il d'elle alors ? Elle avait fait le choix de perdre Demeter car elle n'aurait jamais pu s'imaginer vivre sans son jumeau. Mais si ce dernier ne lui pardonnait pas son geste, alors quoi ? Serait-elle obligée de survivre seule ? Autant se jeter directement du haut d'une falaise plutôt que d'avoir à affronter cette épreuve seule. Deimos comprendrait. Deimos la soutiendrait, il l'avait toujours fait. Deimos était une partie d'elle même, il ne pourrait pas la rejeter. Elle en était sure. Mais pourtant, elle était sûre que Demeter avait toujours pensé la même chose d'elle. Et ça n'avait pas empêché Danaë de la pousser vers la sortie.

Elle lui avait envoyé une lettre cryptique dans laquelle elle lui demandait de la retrouver dans son dortoir. Elle s'était assurée que ses colocataires ne viendraient pas. Elle faisait preuve d'une telle mauvaise humeur ces derniers jours que ces dernières n'avaient de toute façon aucune envie de passer trop de temps avec elle. Ils auraient sa chambre pour eux et si Deimos voulait hurler, si il voulait la condamner pour son geste, il aurait tout le loisir de le faire et elle sera incapable de lui en vouloir. Agitée, elle fait les cent pas dans sa petite chambre en attendant l'arrivée de son frère. Elle s'entraine à voix haute, tente de trouver la bonne phrase. « Deimos, il faut que je te dises un truc. » Trop vague, ce n'était pas qu'un "truc". « Deimos, je suis désolée. » Pouvait-elle encore demander pardon alors que tout était sa faute ? Pourrait-elle se cacher encore longtemps derrière ses excuses ? Elle ne pouvait pas espérer toute sa vie se faire pardonner. Elle devait assumer ses actions, ses choix. « Deimos, promets moi de ne pas me détester. » Car c'était là le fond du problème. Mais elle n'a pas le temps d'y penser plus car le bruit familier de l'arrivée par la voie des glaces de son jumeau se fait entendre, elle qui tourne le dos au grand miroir, elle sait que, quand elle se retournera, elle devra à nouveau faire face à la vérité.

Deimos & Danaë

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Deimos ne tarde pas. Car Deimos est toujours là pour elle. Elle l’a toujours su et jamais rien ne pourra le changer. Enfin elle l’espère. Elle le pense, en est persuadée, mais après tout, Demeter avait peut-être la même sensation il y a encore quelques jours. Quand elle se retourne pour apercevoir la silhouette familière, le temps semble s’arrêter un moment. Elle n’a le temps de rien dire, de rien faire que déjà les bras bien connus l’entourent et instinctivement ses yeux se ferment. Blotties contre son frère, elle aimerait que le temps s’arrête. Là précisément, la tête contre son torse et les mains serrées dans son dos, elle sait qu’elle ne pourra jamais être plus en sécurité, plus aimée ou plus protégée. Deimos est son roc, son phare dans la tempête, sa bouée qui lui permet de se reposer quand la vie s’agite et ne lui laisse pas un instant de répit. « Je suis là Danaë, je suis là. Je suis là pour toi. Qu’est-ce qu’il se passe ? » Elle le sert un peu plus fort, refuse de rompre cet instant. Elle respire son odeur, l’odeur de la maison, de l’enfance et de l’insouciance. Elle sait ce qui va suivre. Elle imagine déjà le visage tordu de son jumeau, partagé entre son amour pour elle et celui qu’il a pour leur sœur. Il ne pourra pas faire comme si ça n’était pas grave, comme si elle n’avait pas détruit leur famille pour se donner de la liberté. Elle espère simplement qu’il ne pourra pas non plus la rejeter pour toujours. Elle ne veut pas qu’il choisisse un camp. Le fait qu’elle et Demeter ne puissent plus se voir ne l’oblige pas à renoncer à elle également. Il doit continuer à être le frère parfait qu’il a toujours été pour toutes les deux, mais comment trouver les bons mots pour être sûre que sa décision aille dans ce sens ?

A contre cœur elle desserre son étreinte, se recule un peu et le regarde pour la première fois dans les yeux depuis son arrivée. Elle doit être rouge, la panique, l’angoisse doivent se lire sur son visage mais elle tente pourtant un petit sourire. « Merci d’être venu si vite. » Elle articule pour commencer. Et maintenant quoi ? Sa préparation s’est envolée et aucune phrase correcte ne lui vient à l’esprit. Elle reste face à lui un instant elle ne saurait dire s’il s’agit de quelques secondes ou de plusieurs années. Dans son esprit, elle repasse sa dernière discussion avec Demeter. Le cœur lourd elle se demande comment retranscrire ça pour l’expliquer à son frère. Par où commencer, que dire ? Elle aimerait tout balancer, appliquer la technique du pansement et tirer un bon coup pour se débarrasser du problème. Mais elle doit y mettre plus de formes, elle le sait, si elle veut être comprise, si son geste impensable doit devenir logique. Mal à l’aise, elle s’agite légèrement sur ses pieds et finit par reprendre la parole. « Deimos, je … j’ai fait quelque chose d’horrible. » La bouche sèche, elle s’arrête et le fixe un instant. Elle tente de décrypter l’expression de son visage. Est-il surpris ? Demeter l’a-t-elle déjà tenue informé ? Elle ne pense pas que le premier réflexe de sa sœur ait été de courir dans ses bras. Demeter est plus indépendante, plus forte, surement plus fière. Elle affronte ses problèmes et ne pleure pas comme un bébé à la différence de Danaë. Demeter est un modèle et elle s’en est débarrassé.

A cette pensée, elle sent les larmes lui monter aux yeux. La tristesse n’a pas diminué ces derniers jours et elle se sent toujours aussi abattue que lorsque son regard s’est posé pour la dernière fois sur sa sœur, partant au loin. « Je pense que tu vas m’en vouloir et tu auras raison. Mais tu dois me promettre de me pardonner. » L’égoïsme à nouveau. Qui est-elle devenue ? Jamais avant elle ne se serait placée avant les autres. Jamais elle n’aurait pensé à elle avant de penser à sa famille. Deimos devrait pouvoir être furieux, il devrait avoir le droit de hurler, de claquer la porte et de ne plus lui parler pendant le temps qu’il aura décidé. Mais elle sait que les mots ne franchiront pas la barrière de ses lèvres si elle n’est pas persuadée qu’il lui laissera une chance, qu’il se contiendra et pourra continuer à la regarder en face. Bien sûr il n’imagine surement pas ce qu’elle lui demande de promettre. Il est toujours facile de jurer une chose dont on ne sait rien. Une promesse peut-elle réellement être une barrière à la déception, à la colère ? Des sentiments si instinctifs, imprévisibles et incontrôlables ? Ses yeux croisent les siens, suppliants et elle rajoute. « Je t’en prie promets le. » Et alors elle cesse de bouger, stoppant ce moment jusqu’à entendre une approbation de la part de Deimos.