Bloom fixait son petit déjeuner avec une intensité particulière. Il y avait une certaine appréhension qui lui tordait les entrailles, comme un monstre cruel et il lui semblait qu'elle n'était pas la seule dans cet état. Pourtant, des résultats d'examens, ce n'était pas la première fois qu'elle en recevait. D'aussi loin qu'elle se souvenait, elle avait toujours réussi ses examens. Certes, la moyenne était loin d'être bonne mais elle savait aussi qu'elle aurait pu avoir pire. A vrai dire, Bloom n'avait jamais été passionné par les cours purement théoriques. À s'asseoir et à prendre note patiemment. Et à Alféa, tout lui semblait différent. Mieux. Son rêve réalisé, elle participait à des cours qui l'intéressaient vraiment. Et pourtant… pourtant, elle n'avait jamais été aussi angoissée qu'à présent. Confronter la directrice et la surveillante sur son identité lui avait semblé soudainement moins douloureux que l'attente des résultats. Ces examens avaient donc une très grande importance à ses yeux. Si elle les réussissait, c'était pour elle le symbole de son appartenance ici. Si elle échouait cependant,... elle préférait ne pas y penser. Après tout elle n'était pas du genre à baisser les bras. Fuir ses problèmes oui, abandonner non. Mais elle savait dors et déjà que les résultats ne seraient pas fameux. Elle était si préoccupée ces derniers temps, préoccupations qu’elle se gardait bien d’exprimer à voix haute qu’elle avait pendant un temps délaissé toutes révisions. Si bien que la veille des examens, elle avait passé la nuit à réviser dans le salon de leur appartement, laissant sa colocataire dormir paisiblement.

Dans le dortoir des Winx, les enveloppes posées les attendaient et Bloom, fébrile, attrapa celle qui lui était destinée. La moyenne… Elle avait la moyenne et le poids qui s’était installé comme un étau sur sa poitrine sembla se volatiliser aussitôt. Elle avait sa place ici, elle l’avait définitivement. « Félicitations les filles, on a réussi !  Merci de m’avoir aidée. Toutes autant que vous êtes. » Lippes fendues en un sourire ravie et sincère, son regard s’appuya plus longuement sur @Flora Egorova qui lui avait accordé temps et patience afin de l’aider dans ses cours. Bloom savait qu’elle n’avait pas été particulièrement attentive ces derniers temps et que par conséquence, sûrement qu’elle n’avait pas été l’amie la plus parfaite pour cette douce fleur. Mais elle comptait bien se rattraper et colmater ce qu’elle avait provoqué, de son mensonge à ses inattentions régulières. La rousse lui devait à Flora, elle le devait à toutes.  «  Allons fêter ça ! J’ai hâte de découvrir ce que vous appelez la fête de la rose ! » Sur Terre, ils n’avaient rien de tel. Pour fêter l’amour, il y avait bien la Saint-Valentin, les fêtes accordées aux parents et aux grands-parents. Mais rien qui sonnait ainsi. C’était donc pour la fée encore une toute nouvelle découverte. Légère déception quand Stella leur annonça néanmoins avoir autre chose à faire. La fée du soleil ayant été son plus grand soutien depuis la découverte de ses pouvoirs, elle aurait aimé partager cette découverte avec elle. Ainsi, se promit-elle de lui ramener quelque chose et le reste du groupe, parées dans des tenues adéquates, quitta Alféa en direction de Magix.

Neuf heures passées et la foule s’amassait sur la place décorée pour l’occasion. Et les yeux de Bloom se perdirent sur les stands, sur les décorations, sur les gens qui passaient sans faire attention à elle. Ca l’émerveillait car il lui semblait que sur Terre, aucune fête ne valait celle qui se dessinait sous ses yeux. Les fleurs déposées de ci et là offraient à l’endroit une ambiance des plus particulières et attirée par les roses, la rousse ralentit le pas, laissant le reste du groupe avancer sans elle. Sans faire attention où elle allait, sûrement qu’elle tentait de se frayer un chemin pour obtenir quatre jolies roses pour les quatre jolies fées qui l’accompagnaient, elle bouscula une femme (@Graziella Ilhem). Elle lui accorda un regard, plongea ses grands yeux bleus émerveillés dans ceux de l’inconnu et sans même savoir qui elle était, elle s’excusa platement. «  Excusez-moi, je ne regardais pas où j’allais ! » Son prénom hélée par @Musa Wuan, elle s’éloigna et rattrapa ses amies. La femme, elle, Bloom semblait déjà l’avoir oubliée. Les roses aussi. « Désolée, je m’étais paumée ! Vous avez vu ces roses ? Elles sont magnifiques ! » S’exclama-t-elle, oubliant dans la joie du moment que ses amies avaient très certainement l’habitude de ce genre de festivités.

Dix heures. La labyrinthe ouvrait ses portes. Bloom, étant Bloom, téméraire et surtout très excitée à l’idée de découvrir encore toute autre chose, proposa l’exploration de ce labyrinthe. Elle jeta un regard à Flora, Musa et @Tecna Tungstène, un sourire espiègle au bord des lèvres et déclara alors :  « Avec vous trois à nos côtés, le labyrinthe ne pourra pas nous mettre à l’amende ! » Elle en était persuadée Bloom. Avec une spécialiste de la nature, une spécialiste des sons qui pourraient de ce fait un très bon moyen de se repérer dans le labyrinthe et la spécialiste de la technologie, les winx avaient toutes les chances de leur côté. Sûrement qu’elle avait une confiance excessive dans leur petit groupe mais les filles étaient celles sur qui Bloom avait appris à compter et à aimer, chacune pour leurs spécificités, toutes pour leurs points communs. Un tout qui avait en son sein de véritables piliers. Ensemble, les filles entrèrent dans le labyrinthe. Ca la faisait rire, ça l’émerveillait. Le labyrinthe était absolument magique. Tel était le mot. Entre les petites étincelles qui leur tombaient sur le nez, les buissons cristallisés par la glace, les plantes et les créatures magiques, Bloom ne pouvait que l’être. Moins quand un insecte venait lui tourner autour. Et encore moins quand elle s’aperçut que @Layla d'Andros n’était plus parmi elles. D’une main, elle attrapa le poignet de Tecna, faisant ainsi ralentir les deux autres. « Où est passée Layla ? » Sourire abandonné, sourcils froncés, elle jeta un coup d’oeil derrière elle et Bloom pinça les lèvres. « J’aurais juré qu’elle était derrière nous il y a encore quelques minutes. » Finalement, peut-être bien qu’elles étaient en réalité capable de se perdre. Et tout ça, dans un décor des plus enchanteurs.

La fête de la rose. Magnifique tradition que la journaliste n’a pourtant pas fêtée comme il se doit depuis des années. Entre ses expéditions, ses préparations une fois de retour sur Magix et l’organisation de ses expositions, Graziella n’a plus pris le temps de participer aux festivités. Pourtant, l’objet de cette fête tient beaucoup à cœur la jeune femme, et ce depuis toujours. Elle prône l’amour sous toutes ces formes, notamment l’amour de la famille, sentiment dans lequel la magicienne du cœur et du sang a toujours trouvé sa force, sans jamais s’en détacher une seconde. Bien que loin des yeux, c’est l’amour qu’elle porte à ses parents et à ses deux frères qui lui a toujours donné le courage d’aller de l’avant et de poursuivre ses objectifs, mais surtout sa promesse.

Et puis surtout, la rousse a bien du mal à imaginer la fête de la rose ailleurs qu’à Domino. Son royaume de naissance faisait parti de ceux célébrant avec le plus de conviction et de moyens cet événement. Encore aujourd’hui malgré les années passées, elle se souvient de ces immenses roses de feu dans le ciel du cœur de la dimension magique, de ces dragons rouges arpentant le ciel pour fasciner les foules, de ces couleurs chaudes mélangées au blanc pur de cette fête traditionnelle. Au côté de la famille royale, chaque fête de la rose était aussi l’occasion de se rapprocher un peu plus du Grand Dragon, au cœur des festivités par son aspect chatoyant, vital pour tous les dominiens, extrêmement attachés aux traditions. Aujourd’hui, même si son royaume n’est plu, Graziella ne pourra jamais oublier toutes ces fêtes passées en compagnie de ceux qui lui sont chers sur Domino, flamme des célébrations dansant encore sous ses paupières closes.

Mais son retour à Magix pour une durée encore indéterminée est peut-être l’occasion d’accorder sa chance aux festivités de la planète capitale de la Dimension Magique. Maintenant que tous les Ilhem sont présents sur Domino, la jeune femme a souhaité profiter de cette occasion pour retrouver sa famille. Bien sûr, Livai passe sa journée avec Artemisia, sa compagne. Rien d’étonnant. Il participera donc au repas de famille prévu le lendemain. Une réunion pourtant habituelle mais qui sonnera probablement différemment suivant cette date. L’occasion de se rappeler les traditions de leur royaume perdu, replongeant dans les souvenirs passés et rappelant à Daniel la planète où il est né mais dont il ne conserve malheureusement aucun souvenir. L’occasion également d’adresser une prière à la famille royale disparue mais continuant de vivre dans les cœurs de la famille Ilhem.

Pour les festivités, la jeune femme a décidé de se faire confectionner une robe dans le pur respect des traditions dominiennes. Une robe blanche, assez longue, en dos nu, laissant à l’air libre cet imposant tatouage présent sur son dos. Le Grand Dragon enserrant son cœur ne passera pas inaperçu mais Graziella l’arbore avec fierté, une autre occasion d’honorer Domino. Mais sur le bas de sa robe blanche, la dentelle a été remplacée par des flammes vives, les mêmes que celles qui entouraient le palais royal pendant les festivités de la fête de la rose. Une manière de rester dans le thème mais de faire comprendre au plus grand nombre que son esprit va aujourd’hui vers Domino et l’amour qu’elle lui porte, n’oubliant pas qu’avant d’être un royaume de glace, Domino a été la plus belle planète de la dimension magique.

Mais avant de rejoindre les festivités, Graziella a choisi de faire un saut tôt le matin à Fontaine Rouge en tenue civile pour assister à l’annonce des résultats. Avant de rejoindre le centre-ville, tous les élèves vont savoir s’ils ont réussi ou non leurs examens trimestriels. La jeune femme les a bien préparés et n’a aucun doute sur la réussite des siens, ou tout du moins de ceux qui le désiraient. En retrait, la rousse guette les réactions des élèves, observant avec attention leur réaction. La plupart d’entre eux ne présentent aucune difficulté d’analyse. Leurs éclats de rire, de joie et leurs sourires montrent leur réussite. Ce n’est que le début de l’année mais une bonne marche de franchie pour la suite de leur année scolaire. D’autres au contraire sont plus résignés, triste, le visage fermé, surement qu’ils n’ont pas atteint la moyenne. Mais ce n’est pas perdu pour eux car la suite des examens prévus au semestre suivant les aidera surement à remonter la pente. Des cours de soutien sont déjà prévus pour les retardataires, que la professeure de survie ne tardera pas à mettre en place dès la reprise des cours pour ne laisser personne à la traine. Le taux de réussite de 100% est peut-être un peu ambitieux, mais elle est sûre que son frère et elle sont d’accord sur la question. Ils doivent approcher le plus possible de ce résultat.

Une fois son observation faite, la jeune femme part se changer avant de rejoindre les rues de Magix, cette fois-ci vêtue de sa magnifique robe. Malgré l’hiver approchant, la magicienne se sent bien ainsi, prête à profiter des festivités, mais surtout découvrir les coutumes spécifiques de Magix. Rapidement, les élèves rejoignent le centre pour s’amuser et décompression de cette dernière semaine particulièrement stressante pour eux. Sans compter les derniers événements du bal qui ont particulièrement mis à cran la population étudiante. Il était donc clair qu’ils avaient tous besoin de s’amuser et de profiter un peu de ce moment qui, la professeure l’espère, ne leur réservera pas de mauvaises surprises.

Tête dans les nuages, peu concentrée sur sa direction, Graziella est percutée de plein fouet par une jeune fille, surement une élève « Il n’y a pas de mal ». C’est d’abord la superbe chevelure rousse, semblable à la sienne, qui frappe la manipulatrice des cœurs. « Tu viens Bloom ? » « Oui j’arrive ! ». La tête inconnue disparait aussi vite qu’elle est apparue dans la foule, laissant la journaliste tétanisée. Sans qu’elle ne le contrôle véritablement, simplement à l’entente de ce prénom, son cœur a loupé un battement. Puis sa magie a pris le dessus. Elle a écouté. Et elle a entendu. Ce rythme, comme tous les rythmes cardiaques, apparaisse uniquement aux yeux de la magicienne. Mais ce rythme-ci n’est pas un rythme inconnu. C’est un doux rythme qu’elle n’a pas perçu depuis 16 ans. Un doux rythme qu’elle a entendu cesser, croyant le silence le posséder pour toujours.

Ce rythme, c’est celui de la seconde princesse de son royaume, Bloom de Domino.

Les sens de la jeune femme s’emballent, incapable de trouver une cohérence à ce qu’elle entend. Et pourtant il n’y a aucun doute possible. Sa magie ne l’a jamais trompé. Elle ne s’est jamais trompée. Elle ne se trompe pas. Bloom, la princesse disparue qu’elle n’a pu sauver, se trouve à Magix en compagnie d’autres élèves, comme si ce n’est rien n’était. Comme si aucune catastrophe n’était jamais arrivée. Comme si jamais elle n’avait disparu de la vie de tous les dominiens. Comme si la famille royale était toujours là pour veiller sur la dimension magique. Comme si Daphné était toujours là pour conseiller les deux aînés Ilhem et se préparer à succéder à Oritel et Marion. Comme si ses parents conseillaient toujours leurs amis et dirigeants d’une des planètes les plus importantes du système magique.

Comme si jamais Valtor et les sorcières ancestrales ne lui avaient pris tout ce qu’elle avait.

Le rythme continue de se déplacer joyeusement, sans inquiétude, alors que c’est celui de la magicienne s’empare d’une angoisse sans nom. Une angoisse au visage de mort et de destruction. Ce n’est pas aujourd’hui que Graziella découvrira la fête de la rose selon Magix.